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2024-12-06-La grande histoire-Le retour du fils prodigue

Le « Retour du fils prodigue » est une parabole racontée par Jésus. On l’appelle aussi le « Père miséricordieux » ou le « Fils retrouvé ». C’est l’histoire d’un fils qui a quitté sa famille et qui revient piteusement à la maison. Contre ses propres attentes, l'accueil par son père est des plus chaleureux. Rembrandt, un peintre néerlandais, en a fait un magnifique tableau et l’histoire de Jos fait penser à cette fable.

 

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Rembrandt 1668

 

 

Tout juste après les funérailles d’Anna, sa mère madame Larouche, invite la famille Desmeules à se réunir chez elle pour discuter de leur avenir. Jos est accablé de douleur et certainement incapable de s’en sortir tout seul. Lorsqu’on est impuissant face à un problème, l’aide la plus précieuse vient toujours de la famille proche. Son père Épiphane voit bien sa détresse et sa mère Marguerite compatie avec son fils. Elle lui dit qu’ils ont déjà réfléchi à cette douloureuse situation et ils lui proposent de revenir au sein de sa famille à Valin. Bien entouré de ses parents, de ses frères et de sœurs, assuré de leur support, il pourra se reprendre en main pendant tout le temps qu’il aura besoin. À cette annonce, Jos se sent déjà soulagé mais il a quand même besoin de quelques jours pour se décider.

 

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Réunion chez madame Larouche

 

 

L’été s’achève, le mois d’août 1901 est presque fini. Jos demeure avec sa belle-mère qui a encore trois jeunes enfants avec elle. En plus, Jos a son fils Épiphane de un an et demi et sa petite Marie-Anne de seulement un mois. Par chance, Ernestine, la toute dévouée marraine du petit bébé, a bien voulu demeurer chez madame Larouche pour s’en occuper.

 

Jos savait déjà que la ferme ne pourrait jamais subvenir à leurs besoins. La communauté l’a très bien compris aussi. Un jeune cultivateur, encore célibataire et vivant toujours chez ses parents, offre d’acheter la ferme et de laisser la famille Larouche habiter leur maison; lui, il pourra s’en construire une plus tard. Les choses se mettant rapidement en place, Jos reconnait qu’il est plus judicieux de retourner dans sa famille pour obtenir l’aide qu’il a besoin. De même sa belle-mère l’encourage dans cette décision, elle-même recevant l’appui de la communauté. Elle lui fait promettre de revenir lui montrer ses petits-enfants quand il le pourra. La décision, maintenant prise, c’est avec une grande tristesse qu’il prépare son départ. Après avoir organisé le voyage par train et son arrivée à Chicoutimi, il part avec ses deux enfants et Ernestine qui l’aidera surtout pour le bébé. Pour Ernestine, ce sera son premier voyage hors de son patelin et la première fois qu’elle prendra le train.

 

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Valin, nous voici.

 

 

Le jour du départ, l’émotion est grande. Par chance, la température clémente permet un voyage plutôt facile. Le train arrive à la gare de Chicoutimi en fin d’après-midi. Léa, la sœur ainée de Jos, est là pour les accueillir. Le petit groupe monte la côte Salaberry pour se rendre au tout nouvel hôtel « Le Château Saguenay ». Léa y travaille depuis déjà un an. C’est un hôtel de luxe et comme Léa est une excellente employée tout comme monsieur Joseph-Dominique Guay, le propriétaire de l’hôtel, est un bon boss, elle a réussi à lui trouver une chambre pour la nuit avant de continuer le voyage le lendemain.

 

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Le train est en gare et le Château Saguenay est en haut à droite.

 

 

Petite histoire du Château Saguenay

 

Dans ce début du 20e siècle, l’industrialisation est très présente. L’industrie de la pulpe est en effervescence à Chicoutimi depuis que messieurs Dubuc et Guay ont ouvert leur pulperie sur la rivière Chicoutimi. Ce même monsieur Guay, homme d’affaires averti, fait une demande au conseil municipal de la ville pour avoir un permis d’alcool pour la construction d’un hôtel. Mais le conseil refuse. Rusé comme un renard, il achète l’hôtel Martin situé au coin de la rue Racine et de la côte Salaberry à proximité de la cathédrale. Possédant maintenant un hôtel avec permis d’alcool, il reconstruit l’hôtel pour en faire un établissement de luxe qui porte le nom de Château Saguenay. Et c’est là que Léa s’est fait engager par ce bon boss. Pour Jos, c’est sa deuxième visite à cet endroit car il y avait séjourné du temps de l’hôtel Martin.

 

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L'hôtel Martin avant sa reconstruction

 

 

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La rue Labrecque tout près de l'hôtel Martin

 

 

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La même rue aujourd'hui.

Gisèle demeure à droite au Manoir Champlain.

 

 

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Le Château Saguenay après la reconstruction

(vue de la cathédrale)

 

 

Comme prévu, Jos, Ernestine et les deux enfants continuent leur voyage vers Valin. Une voiture à chevaux les emmène au quai du bassin pour l'embarquement sur le traversier. Il s’en est fallu de peu qu’ils embarquent sur le nouveau traversier appelé Alcyon. En effet, le dimanche précédent, tous les paroissiens de Saint-Anne s’étaient rendus sur le quai pour assister à la bénédiction du superbe traversier construit par monsieur Pierre Mailloux de Baie Saint-Paul. Malheureusement, le bateau est mal conçu et la coque est trop courte pour la grosseur des machines. Il est retourné pour modifications. En attendant, c’est le Marie-Louise qui continue le service. Jos s’occupe d’acheter les billets de 10 cents chacun pour faire la traversée.

 

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L'Alcyon et son retour à Baie St-Paul.

 

 

C’est Thomas, le jeune frère de Jos qui est venu les chercher au quai de la traverse à Sainte-Anne. Ironiquement, c’est ce même Thomas qui l’avait reconduit, cinq ans auparavant, pour le périple de Jos vers Metabetchouan. Le voyage s’achève et ils arrivent juste avant le souper à la grande maison de Valin. Les retrouvailles sont chaleureuses et Jos sent un poids énorme se relâcher de ses épaules. Lydia, la marraine du petit Épiphane, accourt pour le prendre dans ses bras.

 

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Lydia est bien contente de son filleul

 

 

La famille se réunit autour de Jos et ses enfants. Il n’est plus seul et, entourés des siens, il sent son courage revenir. Ernestine demeure encore une semaine chez les Desmeules afin d’établir une certaine routine pour Lydia qui sera la nouvelle mère pour les deux petits enfants.

 

Les jours passent et le deuil se fait comme il se doit. Malgré la peine énorme de Jos, Épiphane et Marguerite éprouvent une grande joie d’avoir leurs enfants et petits enfants avec eux dans leur maison familiale. C’est ainsi qu’après quelques semaines, une certaine routine s’établit. La joie prend le dessus et il fait bon reprendre les activités familiales.

 

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La famille réunie dans la maison familiale de Valin

 

 

Après cinq ans d’absence, Jos est très surpris de l’évolution de la vie à Valin. Il est surtout très épaté de voir que la lumière est installée dans la maison. Terminé les chandelles et les lampes à l’huile. Maintenant, la maison est éclairée par des ampoules électriques. L’électricité provient d’un « pouvoir » construit sur la rivière Valin au bout des terres des Desmeules. L’écluse de Valin, comme on l’appelle, fournit de l’électricité dans les maisons du village depuis l’année passée. On s’en sert uniquement pour faire fonctionner la lumière le soir car il est très mal vu de la laisser fonctionner pendant le jour. Il est arrivé pour certains contrevenant de se faire réprimander.

 

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Vue d'en arrière

 

 

En cette année, on a parachevé la construction de l’église de Sainte-Anne par le recouvrement en pierres et l’érection du clocher. D’ailleurs, il s’en vient une grande fête pour célébrer la fin des travaux. On apprend dans le Progrès du Saguenay, dans l’édition du 10 octobre 1901, que le jeudi suivant, à une heure et demi de l’après-midi, aura lieu la bénédiction d'un superbe carillon destiné au nouveau clocher de l'église paroissiale. Sa Grandeur Mgr Labrecque fera elle-même la bénédiction. Immédiatement après la bénédiction, les cloches vont être installées dans le clocher. On a même planifié le départ du traversier Marie-Louise à midi et demi du quai de Chicoutimi pour que les concitoyens se rendent à temps pour la cérémonie religieuse. Jos, qui a bien besoin de distraction, accompagnera une partie de la famille pour assister à cette fête.

 

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L'église Ste-Anne enfin terminé

 

 

L’événement attire une foule impressionnante. Même Jos a décidé d’emmener son petit Épiphane. À un an et demi, il est bien docile et d’ailleurs, il a dormi une partie du voyage en calèche. Jos observe tous ces gens rassemblés pour cette cérémonie religieuse. Il remarque un groupe un peu hétéroclite. On lui dit que ce sont des indiens du Lac Clair qui viennent s’installer un peu plus bas dans la côte une bonne partie de l’été pour leur dévotion à la Bonne Sainte Anne. Cependant, ce qui attire le plus les regards est sans contredit les magnifiques cloches. Elles reposent sur des planches de bois juste en façade de l’église. Monseigneur Labrecque arrivera bientôt pour leur bénédiction.

 

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Cloches avant bénédiction

 

 

En levant les yeux, Jos peut admirer la devanture de l’église et la pierre portant l’inscription 1901, juste au-dessus du portail.

 

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Avec éclairage moderne

 

 

Après la cérémonie religieuse, le clou du spectacle est, bien sûr, la montée des cloches dans le clocher. Les ouvriers ont installé des palans sur une poutre de bois fixée à l’intérieur du clocher. Des hommes, au sol, tirent sur la corde du palan et la cloche s’élève lentement. Rendue à la hauteur de la poutre, la cloche est tirée à l’intérieur et fixée sur les embases du mécanisme. L’opération est couronnée de succès. Malheureusement, on ne pourra pas entendre le carillon aujourd’hui. Il faut enlever tout le système de palan et c’est seulement dimanche prochain à la grande messe que le bedeau tirera sur les cordes pour faire balancer les cloches et appeler les fidèles pour la messe.

 

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Ouvrier au travail

 

 

La journée s’achève et il est grand temps de retourner à Valin. Jos est bien content de cette sortie. Ça lui a fait du bien de voir du monde et d’oublier un peu sa peine. Il se sent déjà beaucoup mieux.



06/12/2024
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