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À l’automne 1900, il est convenu, comme pour les années passées, que Jos parte dans le bois. C’est le meilleur moyen de faire de l’argent. La ferme ne fournit pas toute la subsistance de la famille et les revenus sont inexistants. Cette fois, il pourra faire la saison complète et, profitant des avantages consentis par monsieur Jalbert, il reviendra pour trois jours à Noël, trois jours en février et retour à Pâques. D’ici là, les jours passent et on prend des nouvelles d’ailleurs.

Monsieur Jalbert, c'est un bon boss!

Dans les journaux, on apprend qu’on veut faire un lien entre les deux rives à Québec, le premier lien. On parle de faire un pont ferroviaire pour le transport des marchandises, bien sûr, mais aussi pour les passagers. Le projet est adopté et c’est devant une foule de 8 000 personnes le 2 octobre que le premier ministre du Canada du parti libéral, Sir Wilfrid Laurier, la guedoune à Victoria, pose la pierre angulaire du pont de Québec. Ce n’est pas lui qui la pose, ne voulant pas se salir les mains, et de toute façon il faudra l’enlever pour faire quelque chose de mieux l’année suivante quand commenceront les travaux.

Il était accompagné de sa femme, une lady.

Jos ne connait pas Sept-Iles, petit village de pêcheurs de la Côte-Nord, mais il apprend qu’un terrible naufrage a eu lieu le 22 novembre. Un bateau à vapeur, le Saint-Olaf, d’une longueur de 150 pieds, est pris dans une violente tempête et s’échoue sur les récifs de l’une des sept îles, celle qu’on appelle la Grosse-Boule. Il y avait 21 passagers à bord qui n’ont jamais été retrouvés.

Triste nouvelle

À la fin de l’année, on entend parler d’Alphonse Desjardins qui veut créer une caisse populaire d’épargne et de crédit. Mais qui est donc cet hurluberlu? Alphonse est né à Lévis sur l’autre rive au sud de Québec avant qu’on ne fasse le premier lien. Il vient d’une famille pauvre et devient militaire, journaliste et éditeur des débats parlementaires du Québec. Il est parfaitement bilingue. Il finit par être nommé sténographe de langue française à la Chambre des communes du Canada à Ottawa passant six mois à Lévis et six mois à Ottawa.

Monsieur Alphonse Desjardins

C’est là qu’il prend connaissance d’un projet de loi pour empêcher les conséquences néfastes des intérêts sur des prêts usuraires. C’est ce qui le motive à faire une étude des problèmes d’épargne de crédit des petites gens dites de la classes laborieuse. C’est ainsi que le 6 décembre 1900, à Lévis, 130 citoyens, avec la présidence d’Alphonse Desjardins, participent à la fondation de la première caisse populaire d’épargne et de crédit en Amérique du Nord.

La première Caisse Populaire Desjardins

à Lauzon (maintenant Lévis)

Décembre déjà Jos? Quand décembre revient, quand la neige neige, c’est le temps de partir pour le bois. C’est Charlebois qui le chante. Jos remplit sa poche et rassemble ses affaires. Après ses au revoir à Anna, au petit Épiphane et au reste de la famille, il prend le train pour le lac Bouchette. Il reviendra à Noël.

Le 1 janvier 1967, Charlebois chantait:

"Marie-Noël"

Mais, c’est un Noël bien tranquille chez les Larouche. Anna et sa mère on fait une cuisine copieuse à partager avec Jos qui revient du bois, les deux jeunes sœurs d’Anna et son petit frère. L’arbre de Noël a été décoré avec des bonbons et des décorations faites à la main. La crèche au pied de l’arbre est très rudimentaire mais elle présente Joseph, Marie et le petit Jésus.

Ce n'est pas un petit Jésus de plâtre

mais de cire qui est dans sa crèche

C’est la veille et la tradition veut que la famille se rende à l’église pour la messe de minuit. Madame Larouche reste à la maison avec son plus jeune fils et le petit Épiphane. Jos et Anna emmènent les deux petites sœurs d’Anna et joyeusement, ils se rendent à la messe à pied. C’est féérique, la nuit est calme et plein de monde souriant entre dans l’église. L’orgue accompagne déjà la chorale et les cantiques de Noël accueillent les fidèles.

L'église est pleine à craquer

Après la messe, la famille se réunit autour de la table pour le réveillon et déguster les mets que les femmes ont préparés. La dinde, les pâtés à la viande et les fameuses beignes du temps des fêtes. Ce sont de belles réjouissances qui font du bien et qui aident à faire le deuil de la petite Evelina. Pour égayer encore plus l’ambiance festive, Anna annonce qu’elle est de nouveau enceinte. Elle est vraiment heureuse et le ressent vraiment. Peu de temps avant de partir dans le bois, Jos a été d’une grande sensualité et a partagé l'amour avec sa sa belle Anna.

Quel homme amoureux, ce Jos.

La nouvelle année 1901 est arrivée et Jos travaille comme un forcené à couper des billots pour la scierie du lac Bouchette. Il n’a appris que tardivement la grosse nouvelle qui s’est répandue au pays : « La reine Victoria est morte ». Pour certains, la nouvelle provoque une grande tristesse et pour d’autres une grande indifférence selon son sentiment d’appartenance à la monarchie de l’Angleterre.

C'est dans tous les journaux

Victoria est morte à 81 ans le 22 janvier à 18h30 juste après le souper alors qu’elle tentait de soulager ses rhumatismes de vieille dame dans sa demeure sur l’île de Wight. Ça, c’est pas loin de Southampton d’où partira le Titanic, une dizaine d’années plus tard. Selon ses dernières volontés, ses funérailles sont militaires. Sa dépouille est habillée d’une robe blanche et porte un voile de mariée. Elle est portée dans son cercueil par ses fils Edward et Arthur. C’est d’ailleurs Edward qui deviendra roi à sa succession.

"Qu'elle est belle, qu'elle est belle dans sa robe de mariée.

J'aurais tant voulu porter la même."

Mireille Mathieu, 1 janvier 1966.

Victoria a été sur le trône pendant plus de 63 ans, ce qui fait le plus long règne britannique à ce jour. Par contre, Elisabeth II, elle, fera 70 ans. Elle est l’une des souveraines la plus puissante, la plus influente et la plus célèbre de l’histoire de l’Angleterre.  Pour l’empire, c’est toute une époque qui se termine, celle où l’Angleterre pouvait se vanter d’être la plus grande puissance du monde. Victoria était une femme de caractère qui vivait des colères noires, des dépressions et quelques fois des moments de bonheur. Elle était amoureuse et assoiffée de pouvoir.

Victoria et l'empire britannique

Si, au Canada, sa mort provoque soit de la tristesse ou soit de l’indifférence selon son sentiment d’appartenance à la monarchie de l’Angleterre, ici au Québec on a un premier ministre, un couillon libéral, profiteur comme il se doit, du nom de Simon-Napoléon Parent qui envoie ce message :  « C'est avec un grand chagrin que le peuple de cette province, particulièrement les Canadiens français, ont appris la mort de la Reine Victoria dont la bienveillance les a faits les plus loyaux sujets. Ils n'oublieront jamais que c'est depuis son avènement qu'ils jouissent des libertés civiles, politiques et religieuses dont ils sont si fiers ». Non mais faut tu être téteux.

Le téteux à Parent

Un parent du téteux

Ce n’est sûrement pas ce que pensent tous les canadiens-français parce que ce ne sont pas eux qui ont élu ce couillon de premier ministre provincial. En fait, il a pris la succession de Félix-Gabriel Marchand qui est mort l’année précédente et c'est le premier ministre fédéral, Sir Wilfrid Laurier, l’autre téteux qui choisit Parent pour lui succéder. Il a besoin de quelqu'un de compétent qui ne soulèvera pas de vagues et Parent paraît être le candidat idéal. Il fait tout de suite de la politique pour plaire aux capitalistes. Les magouilles libérales ont toujours existées. Par exemple, il accorde des permis aux compagnies d’électricité et aux grosses papetières à même les Terres de la Couronne ce qui permet de montrer des surplus pour le budget libéral. Bon c’est assez. Libérez-nous des libéraux, stie.

Une illustration si révélatrice

Revenons à cette Victoria, Ô ma reine, qui a vu (même si elle a les yeux fermés pour toujours) ses armoiries portées par tous ses successeurs britanniques et même par Charles III, notre roi actuel. Fait cocasse, sur ses armoiries (ces emblèmes de couleurs), il est écrit: « Dieu et mon droit ». En français, s’il-vous-plait, sans aucune intervention de Pierre-Karl Péladeau. Pourquoi en est-il ainsi?

Pourquoi pas?

Il y a très longtemps en France, un certain Guillaume est devenu duc de Normandie. On le surnomme Guillaume le Conquérant, aussi Guillaume le Bâtard ou simplement Guillaume de Normandie. En 1066, il traverse la Manche et envahit l’Angleterre. Fier de son coup, il se fait un beau cadeau le jour de Noël en se donnant la couronne royale. Les Anglais l’appelle William the Conqueror mais lui se fait appeler Guillaume 1^er.

Une belle couronne, Guillaume.

À partir de ce moment-là il unifie son royaume grâce à la langue française qui devient la langue officielle du pays et tous les rois d’Angleterre, jusqu’au 14^e siècle, parlent français. Pas pire pour un francophone. Malheureusement pour nous, les Anglais ont toujours eu une dent contre les Français et leurs descendants comme nous.

Vive le roi Edward VII

Fin de l’intermède.