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La vie s’écoule bien à Murray Bay tout comme à l’Isle-aux-Coudres. Même si ça grenouille dans le monde politique, ce coin de pays est trop loin des grands centres comme Québec, Trois-Rivières et Montréal. Les anglais sont les conquérants et le font bien sentir aux canadiens. Jean-Marc sur son île et Joson dans sa baie n’ont pas beaucoup de nouvelles de ces grands centres urbains.

Montréal en 1802

Marie-Denise, la deuxième enfant de Joson et Constance, est née le 13 mai 1802 exactement neuf mois après ce joyeux intermède dans les champs. Quel beau printemps ce fut. Le jardin a été labouré et semé. Le champ de chanvre a été agrandi et le bois coupé pour le prochain hiver. Faut-il le répéter, la vie est vraiment belle à Murray Bay sur le bord du fleuve.

Murray Bay en 1931

Ça pas tellement changé

C’est peu de temps après les fêtes que la tempête est arrivée. Non pas à Murray Bay mais à l’Isle-aux-Coudres.  Joson et sa petite famille n’ont rien senti chez eux mais ce fut la panique pour ses parents et sa fratrie. Maintenant que nous connaissons Alexis Mailloux, prêtre historien, laissons-le raconter ce drame dans ses mots un tantinet poétiques :

« L’lsle-aux-Coudres a eu le malheur d'avoir pour voisine, au nord, la fameuse Baie-Saint-Paul, qui semble receler, dans ses entrailles, toutes les tempêtes que les païens avaient concentrées dans l'antre du célèbre Éole.

L'antre du célèbre Éole

Sans provocation quelconque de la part de l'Isle-aux-Coudres, qui la préserve des tempêtes des vents de l'est et lui donne ainsi l'exemple d'une bonne voisine, il est arrivé, à plusieurs reprises, que cette ingrate Baie-Saint-Paul a lancé traîtreusement des coups de vent tellement violents, que l'eau du fleuve, entre elle et l'île, poudrait comme de la neige.

C'est pas beau sur l'eau

La première eut lieu le 18 janvier 1803. Le vent du nord arriva sur l'île vers les neuf heures du matin, avec une très-grande violence. Cette rage de vent augmenta graduellement dans le cours de la journée de manière à jeter l'épouvante au milieu de la population. A l'approche du coucher du soleil, la tempête se déchaîna avec une furie incroyable. La violence de ce vent fut telle que la grange du père Perron, celle de François Tremblay et celle d'un nommé Godreau furent renversées et broyées. Un des pignons de la chapelle fut arraché et peu s'en fallut qu'elle ne fût elle-même renversée.

Trouver le lien avec l'histoire

Les habitants de l'Ile-aux-Coudres avaient encore toute fraîche dans leur mémoire cette tempête du mois de janvier, lorsque, dans la même année (1803), à la fin de septembre, il prit encore fantaisie à la Baie-Saint-Paul de lancer sur l'Ile une autre tempête qui, cette fois, dura pendant deux fois vingt-quatre heures. C'était pendant la saison de la récolte. Le blé qui, à cette époque, poussait abondamment sur l'île, était dans une pleine maturité.

La violence de cette seconde tempête fut telle qu'on fut contraint d'abandonner les travaux des champs et de se réfugier dans les maisons qui craquaient sous la pression des bourrasques. Le grain, déjà coupé et mis en javelles, fut emporté le long des clôtures ou dispersé dans les champs voisins. Les tiges qui étaient encore debout furent frappées épi contre épi et complètement égrenées.

Blé en javelles, c'est plus beau qu'en gerbes

Quand cette fureur de vent fut passée, les champs présentaient le spectacle de la désolation. Tout y était culbuté, broyé, mêlé. Les habitants ramassèrent avec des râteaux les pailles dispersées çà et là, afin de sauver au moins quelque chose de leur récolte. Par ce terrible coup de vent, les habitants de l'Ile-aux-Coudres virent leurs champs couverts de grains de blé, ce qui fit à quelques-uns perdre au-delà de quarante minots. La population de l'île ne redoute rien autant que ces vents du nord qui les menacent toujours de quelques désastres. »

Les parents de Joson et sa fratrie

Un autre triste événement survient l’année suivante : la mort de Cécile Desgagnés, épouse en seconde noces de notre illustre ancêtre Charles Desmeules. Elle est décédée le 1 février 1804 à l’âge de 73 ans. Elle fut la deuxième mère de Jean-Marc et bien sûr la seule grand-mère paternelle de Joson.

Dis moi, Cécile, toi qui es notre aînée,
Toi qui fus notre mère, toi qui l'as remplacée,
N'as tu vécu pour nous autrefois
Que sans jamais penser à toi ?

Paroles de Hugues Aufrey

Cécile remplace Céline

Son acte de sépulture fut le dernier de monsieur Marie-François Robin, le septième curé de l’Isle-aux-Coudres. C’est de ce curé dont on dit aussi qu’il avait pour usage, après avoir fait un mariage, de dire au nouveau marié, d'un ton fort peu doucereux : « Donne-moi six francs ; prends ta bête et va-t-en. » Je ne sais pas si c'est l'air pur et l'odeur du varech qui inspire ce langage mais de nos jours encore, mon ermite de frère habitant l'Isle-aux-Coudres appelle sa compagne de vie, "sa bête".

Ma bête-sœur et moi

Pendant ce temps, que se passe-t-il en France, notre mère-patrie? On se rappelle de la révolution française qui a débuté le 14 juillet 1789? Ça fait juste une quinzaine d’années. Le roi a été guillotiné et sa reine aussi. On ne voulait plus de roi ni de reine et ni de royauté; c’est ça que la population ne voulait plus. Mais devinez ce qui est arrivé le 18 mai 1804? On proclame Napoléon Bonaparte empereur des Français. Ce qui veut dire que Napoléon et sa Joséphine deviennent empereur et impératrice du Premier Empire. Autrement dit, on a remplacé le roi et la reine par un empereur et une impératrice et une royauté par un empire. Et? Ben on a changé quatre sous pour une piastre.

Que dire de plus?

Qu’est-ce que le Premier Empire en France? C’est une communauté politique ayant un pouvoir central unique. Autrement dit, plus ça change plus c’est pareil. Il se distingue par sa belligérance. Ça aussi, ce n'est pas vraiment un changement. En tout cas, ces guerres de 1805 à 1815, permettent à Napoléon de conquérir la majeure partie de l'Europe continentale.

Un pouvoir central unique et une belligérance féroce

Qui est Napoléon? Un militaire de carrière mais c'est banal. Parlons plutôt de sa taille: il mesurait cinq pieds, deux pouces, 4 lignes (1,58 mètres). C'est un "homme tout petit", chantait France Galle.

France, la française de France

Napoléon Bonaparte 1er

Selon les idées reçues, Napoléon compensait sa petite taille par une soif de pouvoir, de guerres et de conquêtes. L'expression « complexe de Napoléon » a été utilisée dans certaines publications scientifiques pour désigner le phénomène qui a lieu lorsque des organismes se comportent de façon agressive envers d'autres organismes plus grands. C'est le complexe du "petit". Comme le ti-maudit-chien qui jappe tout le temps et dont on ne peut retirer la pile "Energizer". Le chihuahua en est un exemple éloquent.

Chihuahua de type ti-maudit-chien agressif

Une douce bunny avec option sans pile

Napoléon, donc, était petit mais très agressif. Il portait une chapeau de type bicorne en feutre noir qu'on surnommait le "Petit chapeau".

Petit chapeau sur petit homme

Maintenant qu'il est empereur, il décide d'en finir avec l'Angleterre et de tout simplement la neutraliser. Il prépare ses soldats "la Grande Armée" à une bataille contre ses voisins du nord. Malheureusement,  en 1805, la "Troisième Coalition" se forme en Europe contre Napoléon. Elle réunit l'Angleterre, l'Autriche et la Russie. Napoléon doit faire face à une guerre soudaine, et à l’autre bout de l’Europe. Il mène une offensive immédiate, acheminant la Grande Armée en Autriche à marche forcée, et s’assure une brillante victoire le 2 décembre 1805 à la bataille d'Austerlitz, dite « bataille des Trois-Empereurs ».

Napoléon 1er et sa Grande Armée

Une grande victoire

Napoléon, au lendemain de la batalle d'Austerlitz, déclare aux soldats français : « Vous ne rentrerez dans vos foyers que sous des arcs de triomphe. »  Par un décret impérial daté du 18 février 1806, il ordonne la construction de cet arc de triomphe consacré à perpétuer le souvenir des victoires des armées françaises.

L'Arc de Triomphe à Paris

Et voilà c'est fini pour Napoléon. Comment ça? Quand est-ce qui frappe son Waterloo? Bon, ok, on va y revenir dans un autre chapitre. Mais là, il faut revenir au Canada. En passant, "frapper son Waterloo" n'est pas une expression française mais québécoise provenant de l'anglais "He met his Waterloo".