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2022-11-19-La grande histoire-La picotte à Montréal et Louis Riel à Batoche

La vie continue à Valin. Elle est sans embûche et même monotone. À part les naissances et les décès, tout est une suite prévisible ou presque. Joseph grandit dans ce milieu tranquille, trop tranquille.

Maguerite accouche le 26 janvier 1883 de son sixième, David. Le curé est content. David occupera un rôle important dans la famille Desmeules car c’est lui qui héritera de la terre familiale. On en reparlera bien sûr.

 

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Un enfant tout neuf, yeah.

 

 

Et un an plus tard presque jour pour jour nait le professeur Tournesol. Bien quoi, ce n’est pas une blague. Son vrai nom, c’est Auguste Piccard et il est physicien, aéronaute et inventeur suisse. Il a même côtoyé Marie Curie et Albert Einstein. Bon c’est vrai qu’Hergé s’en est inspiré pour créer le personnage de Tryphon Tournesol dans les aventures de Tintin.

 

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Auguste Picard, lui-même

 

 

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Le professeur Tournesol dans Tintin

 

 

Trêve de plaisanterie, l’année 1884 a été chargée d’émotions pour la famille de Valin. D’abord, le 19 mars, c’est Alexandre Maltais, le grand-père maternel de Joseph, le presque père d’Épiphane qui meure subitement. Il allait fêter ses 69 ans.

 

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Il y était presque

 

 

Comme on le sait maintenant, une mort est toujours accompagnée d’une naissance. Trois semaines plus tard, Marguerite accouche de son septième enfant. On le prénomme Alexandre, un peu pour honorer la mémoire du grand-père, je suppose.

 

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Desmeules

 

 

À la fin d’août, c’est Luc Maltais qui se marie. Il était temps parce qu’à 30 ans, on le qualifiait déjà de vieux garçon. Épiphane s’inquiète un peu pour sa saison de chasse à l’orignal. Est-ce que son beau-frère Luc va encore l’accompagner ou demeurer avec sa belle Virginie?

 

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La belle Virginie

 

Et plus tard en octobre, à 29 ans, c’est au tour de Jean Maltais, un autre beau-frère qui se marie avec Hélène, fille d’un ingénieur originaire de Rimouski. Lui qui est arpenteur, il pouvait approcher le beau-père facilement en jasant de trigonométrie.

 

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Et tu approches Hélène sous quel angle ?

 

 

L’année suivante, le 19 janvier 1885, David Maltais, le dernier beau-frère qui puisse postuler comme époux, se marie également. Il est notaire, une belle profession qui aidera sûrement la famille Maltais et Desmeules dans les futures transactions pour la terre ancestrale.

 

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On va s'en reparler, David.

 

 

Il ne reste qu’Alexandre et Thomas. Pas de mariage en vue pour eux. Alexandre est plutôt attiré par la soutane ou ce qu’elle cache. Quant à Thomas, il est problématique, disons-le comme ça. Il terminera ses jours à l’Hôpital Saint Michel Archange et il ne sera pas le dernier Maltais à le faire.

 

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Ce n'est pas à ça que je pensais du tout, mon cher Alexandre.

 

 

Si c’est vrai que la vie à Valin est sans embûche et même monotone, il en est autrement à Montréal. La mauvaise nouvelle s’est répandue comme une épidémie. Et c’est un jeu de mots. Joseph, du haut de ses bientôt 9 ans, ne comprend pas trop toute cette agitation. La seule personne qui a gardé son calme et qui est en mesure de lui expliquer en quoi consiste cette tragique nouvelle, c’est sans aucun doute sa grand-mère Justine. Cette vieille dame de 62 ans en a déjà vu d’autres. Alors Joseph, assis-toi, grand-maman Justine te raconte :

 

« La mauvaise nouvelle, c’est une épidémie de variole. La variole, c’est la « picotte », une maladie contagieuse qui se répand à Montréal et pourrait gagner Québec et peut-être même Metabetchouan. Bien sûr, Montréal c’est loin, mais ça se propage vite ce mal là. Ce n’est pas la première fois que ça arrive mais on a tendance à oublier.

 

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Simienne veut dire "du singe", tout le monde sait ça.

 

 

Épiphane ne comprend pas trop mais grand-maman Justine ne tarde pas à l’instruire :

 

T’sé en 1759, quand les anglais nous ont envahi pis qu’ils se sont battus sur les plaines d’Abraham? Même que ton aïeul de l’Isle-aux-Coudres, Charles Desmeules, s’est battu contre eux-autres à Baie-Saint-Paul. Ben ils ont été très méchants. Tu sauras, mon gars, que le chef de l’armée des anglais a eu l’idée de donner des couvartes contaminées par la picotte aux indiens pour "toutes" les faire mourir. Pas ben longtemps après, y a eu encore comme une deuxième vague, pis là, la picotte s’étendit partout à Québec pis même jusqu’à Baie-Saint-Paul où je suis venue au monde».

 

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 Eléonore Boivin, soeur de Justine à Baie-Saint-Paul

 

 

 

Merci Justine, je vais poursuivre car ce qui s’en vient est plus compliqué.

 

Par chance, Joseph, maintenant il y a « l’inoculation » ou ce qu’on appelle « vaccination ». C’est le docteur Edward Jenner qui a inventé la vaccination. Il a inoculé le virus de la vaccine de la vache à un jeune garçon et il n’a jamais eu la variole ou la picotte comme on dit. Ça c’était en 1796. 

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Attention, ça pique.

 

 

On pensait bien que c’était fini mais aujourd’hui, en 1885, la variole est arrivée à Montréal. C’est un américain, un contrôleur sur le train de la Grand Trunk Railway (chemin de fer du Grand Tronc), en provenance de Chicago qui nous l’apporte. Comme la frontière n’était pas fermée, le virus se propage rapidement. Montréal devient vite une zone d’infection, une zone rouge pourrait-on dire.

 

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C'est violent, le rouge.

 

 

On oblige tout le monde à se faire vacciner, ce qui ne fait pas l’affaire de tout le monde. Le maire, Honoré Beaugrand, décide d’imposer l’isolement des malades et de mettre Montréal en quarantaine. Les rues sont désertes, les commerces, les débits de boissons, les salles de danse et les théâtres fermés. Des gens qui s’opposent à la vaccination saccagent des lieux publics. 

 

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On ferme tout

 

 

Pendant que la pandémie fait rage à Montréal, transportons-nous à Batoche, une ville de la Saskatchewan dans le ROC (Rest Of Canada). Vous vous rappelez de la rébellion des Patriotes en 1838 qui s’est terminée par la pendaison de De Lorimier en février 1839? Ça, c’était pour l’indépendance des canadiens français. Ben là, il se passe la même chose en Saskatchewan. Les métis se révoltent car les troupeaux de bisons ont pratiquement disparus et la famine les guette. Ils ont peur de perdre leurs terres aussi.

 

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La famine guette les métis, on manque de bison.

 

 

Louis Riel est le chef de ces métis et ils font face aux anglais eux-autres aussi. La chicane est ben pognée depuis un bout de temps, c’est pour ça que Louis Riel s’était exilé mais là il est revenu. Il fait signer une pétition pour réclamer les droits des métis à Ottawa. Et qui c’est ti qui est là, à Ottawa? Ben oui, John A. Macdonald, l’infâme premier sinistre (non, je n’ai pas fait de faute) du Canada.

 

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Le sinistre du Canada et sa phrase célèbre

 

 

Il envoie, par train, une milice de 5 000 hommes pour écraser les métis à Batoche. Les affrontements sont violents. Le 12 mai, le village de Batoche est pris par les forces fédérales et la rébellion des métis prend fin. Et cette fin est la même que celle de la rébellion des Patriotes : Louis Riel est jugé et pendu le 16 novembre 1885. Pendant son procès, il déclare :

 

« La vie, sans la dignité de l'intelligence, ne vaut pas d'être vécue. »

 

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Louis Riel 1844-1885

 

 

Une mauvaise nouvelle !

Avant de poursuivre, il faut annoncer une autre mauvaise nouvelle : Virginie, la belle de Luc Maltais, accouche d’un bébé mort-né le 25 juillet. Le petit bébé est ondoyé et son âme anonyme va rejoindre les limbes.

 

À Montréal, l’épidémie continue sur une rivalité entre les anglais et les canadiens-français que le procès de Luis Riel est venu exacerber. Dans un journal anglophone, on va jusqu’à colporter que si la maladie se propage, c’est à cause de l’hygiène douteuse des francophones. Que voulez-vous ? La recherche de coupables et de boucs émissaires est indissociable d’une épidémie.

 

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Je suis francophone

 

 

À la demande du maire de Montréal, Honoré Beaugrand, le gouvernement fédéral mobilise 600 soldats pour faire respecter l’ordre.

 

L’épidémie dure jusqu’en décembre. Dans ces années-là, de nombreuses personnes, réfractaires aux mesures sanitaires, sont convaincues que le vaccin était plus dangereux que la maladie. Résultat, l’épidémie de variole touche finalement 20 000 personnes au Québec. Elle fit 5 864 morts, dont une immense majorité était des enfants.  91.3% des victimes étaient des Canadiens français convaincus par l’Église catholique qu’il s’agissait d’un fléau envoyé par Dieu pour punir la débauche et qui refusaient la vaccination.

 

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Il faut croire en Dieu

 

 

Comme l’histoire se répète, le 27 février 2020, une pandémie de covid19 touche le Québec. Comme l’histoire est en cours de réalisation, elle sera racontée dans un futur indéterminé.

 

Enfin, l’année 1886 arrive et tout le monde est soulagé. Non pas que la future année est pleine de promesses mais plutôt que la dernière année, celle de l’épidémie, est derrière nous.

 

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Peut-être



20/11/2022
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