2020-09-04-Le phare-La dernière marche
Tout ne va pas toujours comme on le voudrait. Covid oblige, il n’y a presque plus de bois traité à l’Isle-aux-Coudres. J’en achète chez Canac à Chicoutimi et je charge le Ti-campeur comme un mulet. Hélène, qui devait aller visiter ses petits-enfants en Outaouais, doit changer ses plans car le risque d’infection est trop grand. Vendredi matin, nous partons tous les deux pour l’Île. L’atmosphère est morose.
On arrive à midi par le bateau de 11:30. Côme, Danyèle et Bibiane sont arrivés la veille en Gros campeur. Jean-Luc est envahi. Après les étreintes et même le Ti-campeur embrasse le Gros campeur, nous prenons le dîner dehors en mode champêtre.
On touche le quai
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Nous ne perdons pas de temps, Côme et moi, car le mandat est de terminer les travaux extérieurs avant l’hiver. Nous planifions le travail et la stratégie à utiliser pour construire le dernier escalier menant à la vigie, c’est-à-dire, le toit du phare. On s’assoit près de l’ordinateur afin d’étudier les plans de fabrication. On convient de fabriquer les deux petits limons qui seront installés sur le palier de la vigie. Côme voudrait une copie papier des dimensions pour couper le bois. À la place, je fais une photo et nous allons couper les limons.
Voilà les dimensions
Les petits limons presque jumeaux
Ensuite, je monte sur le toit pour installer des pièces de bois de renfort et je marque la position des limons sur le palier. Nous n’en ferons pas plus aujourd’hui. L’apéro est une étape importante et on se réunit dans le Gros campeur, la température frisquette nous y oblige.
Les petits renforts pour y fixer les limons
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Le rendez-vous pour le déjeuner est à 6:00 dans la maison à Jean-Luc. Seuls, les Desmeules y participent, car ce sont des lève-tôt. Les belles-sœurs font la grasse matinée dans leur cocon respectif.
Comme le travail se fera en hauteur et que je ferai le singe, nous commençons par installer la ligne de vie. Une belle corde neuve est fixée au centre du toit et un œil permet d’y fixer mon harnais de sécurité. En cas de chute, je resterai suspendu sur le bord du toit. Ensuite, il faut installer l’échelle sur l’échelle. En fait, l’échelle d’aluminium n’est pas assez longue pour se rendre à la hauteur requise et il faut la remonter sur une échelle de bois. Ce « plan aigre » a déjà été expérimenté.
Empêcher l'échelle de glisser de l'échelle
C'est haut et chambranlant
Côme sur le balcon de Juliette
Non je ne suis pas venu te libérer, princesse
Le travail à faire ce matin est d’installer une entretoise sur l’arête des murs afin de recevoir les limons du palier du toit. La première étape est de poser une ferrure sur laquelle sera boulonnée l’entretoise de bois. Le travail est difficile car il faut percer et visser à bout de bras. D’abord, mesurer la position exacte à partir du dessus du toit de l’emplacement de la ferrure. Ensuite percer un trou de 3/8 bord en bord de la colonne de 10 pouces. Insérer une tige filetée en métal dans ce trou et boulonner la ferrure. Terminer par des vis pour bien enligner. Quand tout est fini, recommencer pour une autre ferrure placée un peu plus bas. Finalement, couper et installer les pièces de bois qui sont elles-mêmes boulonnées aux ferrures. C’est un gros travail de terminé.
Ça discute fort dans les hauteurs
Ok, vas-y, je me tiens après la ferrure et ta visseuse
Pendant ce temps, près d'un phare...
T'en fais pas, Côme, la chienne aussi ne comprend rien
Tout l'avant-midi pour ça?
Le dîner est servi dans le Gros campeur car la température automnale ne nous invite pas à rester dehors. Mais où est donc le petit arrache-clou à Côme?
Maintenant, il faut enlever l’échelle d’aluminium car il faut en prendre une section pour se rendre sur le toit. Le travail consiste à poser les deux petits limons à partir du palier du toit. Lorsqu’ils sont bien fixés sur le palier, il faut redescendre l’échelle et la remettre sur l’échelle de bois pour monter visser les limons sur l’entretoise.
Ok, ça tient par le haut, je retourne en bas
Le chantier dans son ensemble
Maintenant, il faut penser aux deux derniers limons. Avant de les couper, nous prenons des mesures toujours en hauteur et nous allons vérifier si elles correspondent à celles établies par l’ordinateur. Ça semble pas si pire mais nous garderons un peu plus de bois qui à recouper au besoin. Le plus petit des deux plus gros limons est dessiné sur le madrier. Les dimensions sont vérifiées plusieurs fois et les angles encore plus de fois. Alors que Côme procède aux ajustements de sa scie à onglets, le petit arrache-clou prodige est revenu au bercail. Que d’émotions il nous arrache lorsqu’il est retrouvé.
Nous installons le limon en procédant par essais et erreurs. C’est-à-dire, monter et le mettre en place, descendre et couper un ti peu, remonter et vérifier, accepter sa position et finalement le fixer. Tout est parfait.
Il n'en reste plus qu'un
Maintenant, on reprend le tout pour le plus gros des deux gros limons mais nous arrêtons après l’étape traçage. Même s’il n’est que 16:00, la fatigue nous a gagné et les risques d’erreurs sont trop grands. Nous remettons la coupe du limon au lendemain.
Cette pause permet de faire l’entretien de certains appareils et c’est ainsi que Jean-Luc retrouve l’audition. L’atmosphère est à la fête et le Gros campeur se transforme en piste de danse. Jean-Luc fait connaissance avec le Bose et il ne veut plus s’en séparer.
La ratatouille et les filets de truite sont dégustés à l’intérieur pendant que mère nature nous gratifie d’un magnifique arc-en-ciel double complet. Cette beauté ne pourra être captée que partiellement par l’objectif de l’appareil photo. Le dessert est servi et vite suivi par le dodo.
Une partie du spectacle
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C’est une belle journée qui s’annonce. L’accès chez Jean-Luc est refusé : les portes sont barrées. Que se passe-t-il? Ils dorment encore. Je les réveille alors que Côme a rebroussé chemin dix minutes plus tôt. Tout est pardonné car le chef de la cuisine nous prépare une délicieuse omelette. C’est moi qui fais le café et il y a quelques remarques à l’effet qu’il manque de force.
Mais où est ma visseuse? La journée de travail commence par la coupe et l’installation du renfort pour le limon intérieur. Bon, maintenant il faut réfléchir à comment installer le limon extérieur. L’échelle ne nous permet pas de l’atteindre. Nous imaginons un plan d’homme de couleur ayant des grosses lèvres et des cheveux crépus. Nous construisons un échafaud suspendu aux entretoises qui semble assez solide pour me supporter. J’attache mon harnais sur la corde de sécurité et je me déplace sur l’échafaud. Tout se passe très bien.
À quoi tu penses?
Oui, oui, je m'attache avant d'aller la-dessus
Nous prenons des mesures et faisons toutes les vérifications possibles avant de couper le limon extérieur que nous avions tracé la veille. Nous sommes un peu anxieux car il n’y a pas de place à l’erreur. Nous ne pourrions pas acheter un nouveau madrier ni aujourd’hui ni demain.
Enfin nous allons installer le limon qui ne nécessite qu’une petite retouche sur sa longueur. Le reste consiste à poser des renforts sur les points d’appui et à poser le long madrier pour augmenter la rigidité du limon.
Ça travaille bien avec un échafaud
Ça s'en vient
On s'approche du but.
Stairway to heaven
Ma visseuse est retrouvée. Elle était tombée et avait roulé sous le phare. Un événement heureux.
La température est un peu frisquette et le dîner est servi à l’intérieur du Gros campeur. Les rouleaux impériaux finissent par être chauds et les gourganes de la soupe ne finissent pas par être molles, rien à dire pour le gâteau blanc.
Cet après-midi, nous posons les marches. Pour les marches à angle, le travail se fait à deux et nécessitent beaucoup de mesures et d’ajustements avant de les visser. Par contre, pour les marches droites, c’est beaucoup plus facile. Je « call » la mesure et Côme coupe le bois. Il les place dans le sceau et je les monte avec la corde.
Le travail est interrompu par les belles-sœurs. C’est un moment solennel. On prépare l’appareil photo et on doit travailler sous la contrainte du reportage : la pose de la dernière marche devient un événement marquant. La dernière marche est photographiée avant sa coupe finale. Ensuite elle est photographiée juste avant sa pose. Victoire, Côme et moi pouvons monter sur le toit en utilisant l’escalier. C’est un peu comme si on atteignait le sommet de l’Éverest.
Je tiens la dernière marche avant sa coupe finale
La dernière marche avant sa pose
Victoire, nous sommes au sommet
Tout comme dans Titanic, je suis le roi du monde et Céline se met à chanter My heart will go on, Mon Cœur continuera de battre. Il y a beaucoup d’émotion dans l’air. Accéder au toit représente l’étape de la fin de la construction du phare. Le reste sera de l’aménagement et donc de la construction secondaire.
Jean-Luc veut monter dans le dernier escalier mais il se ravise. Comme il n’y a pas de garde de corps, le vide l’aspire.
Il est plus prudent de rester au troisième plancher, Jean-Luc
C’est la fête dans le gros campeur. On lève notre verre à cette victoire et on déguste un délicieux souper concoctée par la madame de la CNESST qui a quelque peu démissionné de son travail de sécurité de chantier. Malgré toute sa bonne volonté le travail en hauteur s’est fait avec les risques du métier.
On termine la soirée par une larmichette de Porto et fromage bleu. Comme dans tous les banquets gaulois, les très festifs Desmeules se chicanent en famille et la madame Julien essaie en vain de les empêcher.
Une partie des fêtards dont un qui est réfléchi
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C’est Bibiane qui fait le café. Cette fois, on pense que la cafetière est brisée car le pot n’est qu’à moitié. On vérifie la machine, on soupçonne un débranchement mais finalement, on conclue que la portion n’était pas assez généreuse. Une poêlonnée de jambon en morceaux et d’œufs cassés dessus nous fait un excellent déjeuner, ce matin.
Avant de débuter le travail, je vais vérifier l’auto de Jean-Luc qui émet un bruit dans la roue avant à gauche. Le temps de lever l’auto, enlever la roue et décrochir la tôle et tout est corrigé.
Aujourd’hui, le travail consiste à construire le garde-corps. Il y a beaucoup de mesures à prendre, de coupe à effectuer et d’ajustements à faire. Le travail est long.
Le dîner est annoncé. Nous mangeons une bonne soupe et des crevettes papillons à l’ail. Comme Danyèle s’est désistée à manger des crevettes, il y a un nombre impair de convives pour manger un nombre pair de crevettes. Hélène organise un tirage pour attribuer une crevette esseulée. C’est Bibiane qui gagne. Mais dans sa grande générosité, elle l’a donne à un goinfre et va même jusqu’à m’offrir une demi-crevette de sa ration. Pensez-vous que j’ai accepté? Oui.
On continue les garde-corps. C’est toujours le même travail long et fastidieux. Mine de rien, le garde-corps, même sans barreaux, libère certaines personnes de leur peur du vide, si bien que Bibiane est la première à oser monter jusqu’au sommet. Elle vite suivie par Jean-Luc et Hélène. C’est encore une autre victoire. Il faut fêter ça et l’heure de l’apéro est annoncée.
C'est là où nous en sommes quand soudain,
Bibiane monte jusqu'à la vigie
Et Jean-Luc ne manque pas l'occasion
Descends ou je te descends
Je descends pour l'apéro
L'apéro des belles-soeurs
Le souper est généreux : filets de porc et sauce à la crème-moutarde. Hum, miam miam. Bien sûr, il y a chicane de famille qui n’en est pas une.
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La journée est bien ensoleillée et la température clémente. C’est moi qui fais le café et j’en fais plein. Il y a eu quelques remarques à l’effet que la portion d’hier était peu généreuse et que celle d’avant manquait de tonus. Le tir a été corrigé. Jean-Luc nous cuisine une très délicieuse omelette.
Le déjeuner des Desmeules
Le chef et son omelette
Après la lecture des journaux, je vais chez GGJ acheter un peu de bois et du fascia pour finir le toit. Ensuite, on termine le garde du palier et on pose les balustres, les ti-maudits poteaux.
La pose des ti-maudits barreaux
Malheureusement, on manque encore de bois. Côme est nommé volontaire pour aller en acheter pendant que je pose le fascia sur le rebord du toit. Il n’est pas encore midi que le travail est encore une fois interrompu. Non, pas vrai, on a fini.
Les barreaux et le fascia sont presque terminés
Effi fi enne ini fini
Par contre, c’est un autre moment solennel. Le champagne sera sablé sur la vigie en compagnie de tout le monde. Côme et moi sommes assis sur le toit alors que les autres restent sous la protection des gardes du corps. Même la madame de la CNESST réussit l’ascension, elle qui avait dit qu’elle ne monterait jamais. Pour me narguer, elle n’a même pas mis sa ligne de vie. Quelle insouciance. Nous buvons à même la bouteille au grand dam du Covid.
Assis au sommet
Une grande victoire pour Danyèle
Les belles-soeurs au sommet
Le maître séant
Le dîner est champêtre sous un magnifique ciel bleu. La température a insisté pour faire partie de la fête.
Un dîner champêtre chez les Desmeules
En après-midi, on ramasse le chantier et je bloque l’accès au dernier escalier. Mon travail est rejeté. On fait appel à l’autre constructeur pour ériger une barrière à toute épreuve. Je ne m’en offusque pas.
Pendant que je vais faire une ballade à pied avec ma belle frisée, d’autres en profitent pour faire un petit roupillon.
Jolie, l'Île
L’apéro commence tellement tôt qu’on n’a pas envie de boire. Mais Jean-Luc sait comment s’y prendre et en se servant un Triple Sec sur glace et zeste de lime, il m’entraîne dans son vice.
La température ayant revêtu son manteau d’automne et les mouches achalant les susceptibles, le souper servi dans le campeur. Encore une fois une discussion animée porte cette fois sur l’identité personnelle, les téléphones de maison et l’équité salariale.
2020-09-09-mercredi
Il a plu pendant la nuit et il pleuvra aujourd’hui. Le temps est doux. Le déjeuner se fait encore entre les Desmeules.
Le Ti-campeur est prêt pour la route. Nous quittons pour le bateau de 9:00 alors que Côme, Danyèle et Bibiane prennent le suivant. Je pense que l’été est fini.
À bientôt, Isle-aux-Coudres
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