pharamen

C’est un dimanche très nuageux, chaud et humide. Je me prépare à partir demain pour l’Isle-aux-Coudres. Hélène me signifie que je pourrais partir après-midi. Ah bon, je trouve que c’est une bonne idée parce que j’ai des mesures à prendre au laser et il faut la pénombre. En plus, je serais tôt au travail demain car comme on prévoit de la pluie, je risque d’être arrêté de temps en temps. Après une dernière discussion, je pars vers 15:15. Tout se passe très bien. La route est belle et sauf deux téteux, j’arrive pour le bateau de 17:30. Jean-Luc m’accueille et il est content d’avoir de la visite. Un vin rouge pour accompagner le souper impromptu et je m’installe dans le phare pour la nuit. La dernière fois, je n’avais pas de photo de mon dortoir et on me l’a reproché. J’y remédie maintenant.

Salut, encore moi

Ma chambre dans le phare et table d'ordinateur,

le minibar est juste en arrière.

2020-07-27-lundi-jour 73

Il est 6 heures. Mon téléphone me fait jouer le chant des goélands et le bruit des vagues. C’est mon réveil. Il fait chaud, le ciel est couvert et c’est humide. Humide car on ne voit pas à 10 mètres tellement le brouillard est intense.

Je déjeune seul, Jean-Luc a déjà mangé. Il est plus tôt que les poules, lui. Je commence ma journée de travail par corriger les plans sur mon ordinateur. Une chance que je suis bien installé. J'ai une table, une chaise et des prises de courant. Je suis comme dans les chantiers où j’ai travaillé. Je travaille près de deux heures à corriger tous les plans de l’escalier-1. Il y avait une erreur sur la distance verticale entre la galerie et le palier et j’ai dû refaire les plans.

J'ai refait les plans

Je commence le chantier tranquillement. D’abord j’enlève la pièce de bois frontale du palier-2. Je la remplace par une autre plus longue qui permettra de poser le limon de l’escalier-2 en porte-à-faux et éviter de poser des pièces de renfort sur le phare. Le limon c'est la pièce qui reçoit les marches et les contremarches.

Ben non, ça restera pas d'même

Ensuite, il faut installer la scie à onglets que Côme a eu la bonne idée de laisser au chantier. Sans cette scie, le travail aurait été encore plus long et difficile. Maintenant, je suis prêt à dessiner les limons sur le madrier de 2 x 12 de 16 pieds de long. Mais qu’est-ce qu’un madrier, me demande Jean-Luc? C’est une grosse pièce de bois. Avant, on construisait avec des rondins. Les maisons étaient en bois ronds. Maintenant, on équarrie le bois et on fait des madriers.

C'est plus facile de dessiner à l'ordinateur

Pour dessiner le limon, je dois faire plusieurs allers-retours à l’ordinateur pour prendre les mesures exactes. Je dois vérifier 4 ou 5 fois pour être bien certain, car si je me trompe, c’est un madrier qui sera gaspillé et le travail aussi. Finalement, je suis prêt à faire la découpe. La pièce de bois est lourde. Je dois m’installer des supports de chaque côté de la scie.

Je commence la coupe. Pour les marches droites, ça va assez bien. Mais ensuite, il faut couper à angle composé pour les marches à angle. Le risque d’erreur est grand.  Je prends mon temps et lorsque Jean-Luc m’appelle pour le dîner, j’arrête aussitôt. Il vaut mieux se reposer et continuer lentement.

Le premier limon intérieur étant terminé, je suis plus confiant pour le limon extérieur. En plus, il est un ti-peu plus facile. Maintenant qu’ils sont tous les deux coupés, j’installe un 2 x 4 de renfort sur la longueur pour augmenter la rigidité de la structure. Je termine en coupant les angles pour la finition.

Essai du premier limon sans la coupe

Pose du premier limon (photo prise par l'artiste)

Jean-Luc vient m’aider pour poser les limons. Il se questionne sur le parallélisme des deux limons. Il est convaincu qu’ils ne sont pas parallèles. Je lui explique que c’est une illusion d’optique causé par les points de fuite lorsqu’on voit en perspective. Je ne pense pas qu’il a tout compris mais demain il va monter dans l’escalier et il sera droit.

En voilà deux ce posés

Fatigué, Jean-Luc?

Je te dis qu'ils sont parallèles, j'ai mesuré.

Pour le prouver, voici deux morceaux de bois de la même longueur.

Tu me cré-tu là?

Elles aussi sont sceptiques. Esprit de basse-cour.

Je termine la journée par l’installation d’un renfort et je ramasse les outils. On prévoit de la pluie. Après la douche, le souper est servi dehors sur la galerie de la maison. Il fait superbement beau. La lune affiche un gros D pour dire qu’elle croit et non Décroit.

2020-07-28-mardi-jour 74

La froid est arrivé pendant la nuit. Je dormais en dehors de mon sac de couchage mais ce matin, je l’avais par-dessus la tête. C’est nuageux et frais. Je vais voir le frère qui termine son déjeuner. On lit nos journaux et facebook et ma journée commence à 8:00. Je découpe les marches d’angle situées en haut de l’escalier-1. C’est un travail de mesurage, de collage, de coupe à angle pointu, tout ce qui n’est pas simple. Je finis par finir et les trois marches sont déposées et non vissées. Elles le seront plus tard lorsque tout sera ajusté selon les angles.

Les marches droites sont faciles à couper et installer.

Quoi? Les marches ne sont pas centrées?

Normal, elles ont une partie en porte-à-faux.

Je m’attaque maintenant à faire les marches droites. C’est facile. Il faut couper deux morceaux de 2 x 6 à 34 pouces de longueur. C’est la largeur minimale permise pour un escalier. Je les refends à 5 1/8. Les deux morceaux forment une marche de 10 1/4 de profondeur qui laisse un nez de 1 pouce sur le limon de 9 1/4. C’est ce qui correspond aux normes de construction. Vous comprenez que l’escalier sera plutôt facile à monter surtout pour les personnes vieillissantes.

C'est beau avec les marches d'angle

Vous n’avez pas compris le porte-à-faux, hein?  Un ouvrage en porte-à-faux se dit d’une installation qui n’est pas d’aplomb. Attention, ça ne veut pas dire que ce n’est pas solide. Il y a une partie qui est dans le vide mais qui est supportée par le reste de la construction. En anglais on utilise le mot « cantilever » et les français, bien sûr, utilisent ce mot plutôt que porte-à-faux. Vous connaissez tous le pont de Québec mais sachez que c’est le pont à poutre « cantilever »  ayant la portée libre la plus grande au monde. Ça fait que mes marches en porte-à-faux, inspirées du pont de Québec, sont capables de vous supporter dans le vide.

C'est la partie en losange à gauche qu'on appelle cantilever.

Tout le reste est suspendu dans le vide.

C'est beau l'ingénierie, hein?

À midi, j’ai terminé la pose des marches et l’ajustement des marches d’angle. On peut monter et descendre facilement. Jean-Luc est satisfait du travail.

Il nous est tombé un gros orage, si bien que j’ai dû arrêter les travaux pendant dix minutes. Le pauvre Jean-Luc était en promenade avec Capucine qui n’a pas tardé à lui signifier que la décision à prendre était le retour à la maison.

Enlève la cédille et t'auras mon diminutif

Après le dîner, je commence à mesurer le limon intérieur de l’escalier-2. Avant d’aller trop loin, je pose un cordeau entre les deux paliers afin de vérifier mes dessins. Horreur, ça ne correspond pas. Je commence la correction et je réalise que tout est correct. Je dessine le limon sur le madrier. Tout ne va pas bien. J’ai commencé les mesures et j’ai voulu utilisé mon gabarit mais il était inversé. Je corrige le tout et je réalise que ça ne fonctionnera pas. J’inverse mes repères de dessins et je finis par compléter le dessin du limon. Je commence la coupe horizontale des marches sur la scie à onglet avec un angle de 51.2 degrés.

Mais, ça ira mieux demain

Pendant ce temps, Jean-Luc vient faire son inspection et s’aperçoit que la chienne a monté l’escalier sans notre permission. Quelle ingénue, elle aurait pu tomber et pendre au bout de sa laisse. Il a fallu la gronder un peu.

Elle aurait pu tomber

Je finis la journée en protégeant les outils et le bois. Mais juste avant de souper, je jette un coup d’œil sur mes dessins à l’ordinateur et je réalise que ça ne marche pas. Je conclus que j’ai perdu un madrier et un après-midi de travail. J’en parle à Jean-Luc qui est plus attristé que moi. Je devrai refaire les plans et commander un autre madrier. Par chance le souper est bon et le vin joyeux.

Non, ça marche pas et j'ai peur d'en perdre mes cheveux

2020-07-29-mercredi-jour 75

La nuit a été mauvaise. J’ai pensé à mon problème de limon et des dessins. J’ai essayé de trouver le problème sans succès. Hier, mon vieux frère est allé chez GGJ pour acheter des crochets pour sa porte de screen. L’étourdi avait oublié son masque et on n'a pas voulu le faire entrer dans le magasin. C’est Capucine qui est allée acheter les ti-maudits crochets.

Il n'est pas réglementaire ton masque, Capucine.

En tout cas on a les crochets.

Ce matin, c’est nuageux et un peu frais. Je suis de bonne humeur quand même et après le déjeuner, je pose un crochet sur la porte de screen à Jean-Luc.

Je commence ma journée par travailler sur les dessins et à prendre des mesures sur place. J’installe un cordeau afin de déterminer la position du limon sur les paliers. Ensuite, je refais tout les dessins du limon intérieur et par bonheur, je pourrai réutiliser le madrier que j’ai commencé à couper. Je refais le dessin du limon sur le madrier et je continue à couper avec la scie à onglets et je termine les coupes à l’égoïne. C’est pepére Nolet qui serait fier de moi.

C'est compliqué ces mesures

C’est l’heure de dîner et je n’ai même pas fini de couper. En après-midi, je continue la coupe mais je fais face à des problèmes. La scie à onglets ne peut pas couper les entailles au complet. Je dois terminer avec la skill saw. Je doute de mon angle et je fais plusieurs essais. Finalement, je pense avoir fini.

J'espère que ça va faire

Je monte dans l’échelle plus d’une fois pour installer des morceaux de bois qui recevront le limon. Après avoir tout mesuré, je monte le limon sur le premier palier où il tient en place par une planche vissée temporairement. Je prends l’autre extrémité du limon et je monte dans l’échelle pour aller la placer sur le deuxième palier. Je le maintiens en place avec une vis. Je redescends pour faire les ajustements. Jean-Luc ne comprend pas trop comment il tient en place sans tomber. C’est simple, il faut combattre la force gravitationnelle.

Oui, ça va faire

Je suis fatigué du cerveau. Je me détends en appliquant du préservatif à bois sur les bouts sciés. Jean-Luc fait l’inspection et on arrête vers 16:00 pour se reposer un peu. Mais avant de souper, je travaille sur les dessins du deuxième limon pour demain.

La journée a été épuisante de contraintes mais le limon est en place. On reprend la même chose demain.

2020-07-30-jeudi-journée 76

Il pleut ce matin. La journée s’annonce peu productive. Après la routine du déjeuner, je retourne à mon ordinateur pour compléter les plans du limon extérieur de l’escalier-2. Je mets mon imperméable et je fais quelques travaux de finition et de renfort pour l’escalier-1. Par bonheur la pluie cesse et je vois un trou dans les nuages. Il commence à faire très chaud. J’installe le madrier sur la table et je reproduis le dessin du limon. Tout comme hier, je travaille à la coupe. C’est plus facile que l’autre limon et à midi, il est prêt à être monté en place.

Après le dîner, je prépare les pièces de bois qui vont recevoir le limon. Malheureusement, la pluie commence à tomber et généreusement. Je dois cesser mon travail et je retourne dans mon bureau pour travailler un peu en attendant le beau temps.

La pluie baisse et je revêts mon imperméable pour continuer le travail. Je monte le limon en place entre les deux paliers. Je travaille seul alors je dois faire des montages pour tenir le limon en place pendant que je fais les ajustements.

Bon, il est en place.

Je réussis à mettre le limon extérieur et je vérifie sa position. Je suis un peu beaucoup découragé. Rien ne fonctionne correctement. Les angles n’adonne pas, l’équerrage n’adonne pas, le nivelage n’est pas bon. Au premier coup d’œil, je pense recouper l’angle du limon sur le palier. Je pense qu’il faut avancer le premier limon de deux pouces alors qu’il est déjà tout vissé. La distance entre les deux limons n’est pas bonne. Pendant que j’élabore des stratégies de corrections, je m’aperçois que la base du limon n’est pas à la bonne position. Je refais un montage et replace le limon et tout redevient parfait. Les plans étaient bons, c’est moi qui ai fait une erreur au montage. Après correction, tout rentre dans l’ordre et les angles sont parfaits, l’équerrage est bon, le nivelage est au poil. Je suis tout content. Le reste, c’est de la petite bière et elle sera bonne ce soir.

Quand ça va mal !

L'espoir est toujours là.

Je continue ma journée en commençant la construction et la pose des marches à angle. Jean-Luc me réclame pour l’apéro et je décide qu’il est plus important de sociabiliser que de travailler pour finir. Je décide de partir plus tard afin de compléter mon objectif. Je devais quitter demain matin, mais je vais repousser le départ à midi.

Les marches à angle, ça m'encourage.

Le souper est bon, la petite bière est délicieuse  et le vin, le vin, il faut le boire quand il est tiré, voilà.

2020-07-31-vendredi-jour 77

C’est ma dernière journée. Il faut que je finisse l’escalier menant au troisième. J’avais l’objectif de faire monter Jean-Luc dans la rotonde du troisième niveau. Je dégonfle mon matelas, je ramasse mes affaires et je me prépare pour le départ. Je vais déjeuner avec Jean-Luc et à 7 :00 je suis prêt à travailler.

Mais il est tôt pour faire vrombir les outils, alors je charge l’auto et je prépare le bois pour les marches.

Je travaille sur les trois marches d’angle du bas de l’escalier. Ça prend du temps, mais lorsque je fais les marches droites, le travaille avance si vite que Jean-Luc est étonné du progrès. Après je reprends un rythme des marches d’angle du haut de l’escalier. Monte, descend, monte, descend. Au moins je ne suis pas dans l’échelle. Je finis par la finition, ce qui est normal. Je pose un nez de marche sur le palier du troisième. Ensuite je pose un raidisseur sur le palier du deuxième et je coupe les excédents de bois pour la beauté de l’ensemble. J’invite Jean-Luc à monter dans la rotonde. Il monte l’escalier de bas en haut.

Tu voulais monter dans l'escalier? Et bien vas-y !

Bienvenu dans la rotonde, au troisième.

Je suis content d’avoir atteint mes objectifs. Jean-Luc est très fier du résultat obtenu et moi donc.

Je quitte à 12:30 espérant un retard du bateau, mais je le manque de peu. Je suis le premier dans la file pour celui de 13:00. Il fait chaud et je quitte après cinq jours. Le moi de juillet est terminé.

Tu peux redescendre, je reviens en août.