2019-02-19-La grande histoire – Le PC et le pot
En ce tout début du dix-neuvième siècle, nous connaissons le Premier Empire de Napoléon en France et le commerce des fourrures de la Hudson’s Bay Company et de la North West Company, au Canada. Mais que se passe-t-il donc ici dans la province de Québec plus près des Desmeules de l’Isle-aux-Coudres et de Murray Bay?
Nous savons que le Canada est divisé. Géographiquement parlant, il y a le Haut Canada et le Bas Canada (disons l’Ontario et le Québec actuels). Il est divisé aussi par la langue, l’anglais et le français. Il n’est pas bien difficile de comprendre que les anglais parlent anglais dans le Haut Canada et que les « canadiens » parlent français dans le Bas Canada.
Oui on parle français mais on est pas des français
Les anglais sont les conquérants, ne l’oublions pas, et ils sont un peu partout même dans le Bas-Canada. Les anglais sont en majorité des commerçants et les canadiens sont en majorité des cultivateurs. Pendant une campagne électorale, un candidat anglais écrivait dans son feuillet : « Le Marchand Britannique doit être regardé comme le meilleur ami du cultivateur des terres dont il récompense l’industrie ». Un quota de lait avec ça?
Les commerçants du lait?
Avec la guerre d’indépendance des États-Unis, un nombre important de loyalistes toujours fidèles à leur roi se sont exilés au Canada principalement dans les Cantons de l’Est. Alexander Mackenzie, lui, est allé à Montréal à cause des matantes. En janvier 1805, ces loyalistes commerçants lancent un journal, le Quebec Mercury, pas québec mère curie, qwibecque meurt curie. Ses rédacteurs accusent la majorité canadienne de se complaire dans l’ignorance, d’être paresseuse, apathique, indifférente au progrès. Ben non, Lucien Bouchard n’est pas encore né.
De qwibecque meurt curie
Mais Pierre Bédard est né, lui, et il est choqué ben noir. C’est un fils de boulanger de Charlesbourg et il n’a pas l’intention de se faire rouler dans la farine. L’année suivante, en novembre, pour riposter aux commerçants anglais, il lance un journal, Le Canadien. Il fonde son propre parti politique, le PC qui signifie le « Parti Canadien ».
Pierre-Bédard, lui, n'a pas peur des anglais
Et voilà, la chicane est pognée. Mais nous y reviendrons. Pour le moment ce ne sont que des mots dans les journaux.
Ce ne sont que des mots?
Pendant ce temps, Joson cultive son chanvre et fait des enfants à Constance. Il prend la vie calmement car la politique ne l'atteint pas vraiment à Murray Bay. Justement, pendant qu’il fume sa pipe devant son poêle à bois, il constate avec horreur que sa blague à tabac est vide. Il vient de terminer sa réserve de tabac et il n’en aura pas avant l’arrivée du prochain bateau.
Le reconnaissez-vous?
Depuis le temps qu’il cultive le chanvre, l’idée lui vient tout naturellement d’aller ramasser quelques feuilles séchées dans la grange et pourquoi ne pas en bourrer sa pipe? Vous devinez bien ce qui arriva? Eh oui, il n’aima pas ça. Ça sentait le foin brûlé et ça n’avait pas bon goût. En plus ça brûlait le fond de la gorge.
Cé pas yabe bon
Tant pis, il faut fumer. Sauf qu’après dix minutes, le fun a pogné. Il s’est mis à jouer avec les enfants et à rire de les voir rire. Joson venait de découvrir les propriétés psychotropes du chanvre. Ne me dites pas qu’il va faire ce qu’il fait avec l’Aquavit?
Propriétés psychotropes, c'est quoi?
Bon c’est bien beau les histoires mais là nous sommes sceptiques. Du chanvre? Eille, c’est pas du pot, ça. Ok voici le cours 101 sur le pot et les sceptiques seront confondus.
Le chanvre c’est le mot dérivé du mot latin cannabis. Alors chanvre et cannabis, c’est pareil. C’est une plante qui fait partie de la grande famille des Cannabaceae. Dans cette famille, il y a deux genres : le chanvre et le houblon ou en termes plus savants, le cannabis et le humulus. Le cannabis (chanvre) est une plante annuelle et le humulus (houblon) est une plante vivace.
Ça, c'est du cannabis, c'est du chanvre, c'est une plante annuelle
Ça, c'est du humulus, c'est du houblon, c'est une plante vivace
Il y a deux sortes de cannabis ou chanvre : le chanvre agricole et le chanvre indien. Le premier sert à la fabrication des cordages et le deuxième sert à se droguer. Quand on parle de drogue, il faut être prudent et il est préférable d’utiliser des termes savants. Alors pour le chanvre indien, on appelle ça cannabis ou sativa ou indica ou rudéralis. Pour le chanvre agricole, on appelle ça du chanvre.
Ça, c'est du cannabis, c'est du chanvre indien
Ça, c'est du chanvre agricole, c'est du chanvre
Tu vois bien la différence?
Bon alors, quelle sorte de chanvre que Joson fait pousser? On ne le sait pas. Dans ce temps-là, on ne faisait pas de différence avec ça. Est-ce que Joson s’est vraiment drogué avec sa pipée? C’est possible mais il a été chanceux. Voici pourquoi.
Premièrement, il a ramassé des feuilles d’une plante femelle. Dans son champ de chanvre, il y a des plantes femelles et des plantes mâles. Les deux fournissent la fibre pour les cordages mais seules les plantes femelles sont riches en substances psychotropes et font des fleurs. Les plantes mâles servent à la pollinisation pour féconder les femelles.
La plante mâle expose ses bijoux, la plante femelle est pudique mais elle fait de l'effet
Deuxièmement, il a ramassé des pétales de fleurs qu’on appelle aussi cocottes et non des feuilles. C’est dans les fleurs qu’on retrouve le plus de substances psychotropes.
Il y a des fleurs de macadam et des fleurs de cannabis
Troisièmement, la fleur qu’il a fumée n’était pas fécondée, parce que si elle avait été fécondée, elle aurait produit des graines et non des pétales.
Toi, tu as été fécondée, petite écervelée
Conclusion : Joson a fumé une fleur vierge de cannabis. On peut bien l’appeler Marijeanne, hein ma cocotte?
Marie Jeanne? C'est toi ma cocotte?
Malgré toute la fumée dégagée par sa pipe, Joson ne flaira pas la bonne affaire et il continuera à produire des fibres de chanvre pour les cordages. Mais il aurait pu tout aussi bien se servir de ses fibres pour faire des carrioles. En tout ca, dans le futur, ça va arriver. Et pas plus tard qu’en 1941 quand Henry Ford, encore lui, fit développer la Hemp Body Car (la voiture à carrosserie en chanvre). Elle était entièrement réalisée en un matériau obtenu à partir des graines de soja et de chanvre. Plus que ça, son moteur était alimenté par un carburant fait d’éthanol de chanvre.
Hemp Body Car 1941
C'est pas croyable
Encore dans le futur, en 2012, une industrie canadienne basée en Alberta dévoilera sa Kestrel, une petite voiture avec une carrosserie entièrement fabriquée à partir du chanvre. Elle aura des batteries au lithium, une autonomie de 160 km, une masse de 850 kg et une vitesse maximale de 135 km/h.
Une Kestrel 2012
C'est pas plus croyable
Coudon, est-ce que j’ai fumé du pot?
Non pourtant
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